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Les deux Genevois participeront aux Mondiaux
Juniors 2003 à Trapani (en Sicile)
Jean-Baptise Carrard ne tient plus en place.
Jeudi dernier, il a appris de la bouche même de son maître d’armes, Jean-Marc Cagnet, qu’il remplaçait Robin Dederding
en Sicile. Au pied levé. Ironie du sort: début mars, le Genevois avait été
recalé. Après la victoire de son camarade de club à l’Ours de Berne. Il avait
pourtant terminé troisième de l’épreuve. La vie est parfois malicieuse. «Pour
moi, la saison était terminée, explique Jean-Baptiste. Mais j’ai continué à
m’entraîner fort. Comme je passe en seniors dès l’automne prochain, je voulais
prendre un peu d’avance...». Depuis jeudi, le Genevois met les bouchées
doubles. Afin d’être prêt le jour J. Il vient de passer son week-end à Bâle.
Avec trois heures quotidiennes d’entraînement au menu. Aujourd’hui, il
s’envolera pour la Sicile. Des ambitions plein la tête.
À 19 ans, Jean-Baptiste Carrard cueille enfin
le fruit de ses efforts. Victime d’une hernie inguinale en été, souffrant d’une
hépatite pendant les vacances de Noël, il s’est battu pour revenir à son
niveau. «Il y a un mois, j’ai décroché une sixième place en Coupe du monde à
Burgos, en Espagne, précise-t-il. C’est mon meilleur résultat!» Au passage, il
avait d’ailleurs battu le champion du monde cadets et
le No 8 mondial... Le Genevois est donc dans une forme ascendante.
Prometteur avant le premier assaut à Trapani! «Je ne me rends pas en Sicile
pour apprendre, j’y vais pour aller le plus loin possible», lâche-t-il. Sans se
démonter. Le discours peut surprendre dans la bouche d’un jeune homme qui
participera à ses premiers championnats du monde.
Mais Jean-Baptiste Carrard a de qui tenir.
L’art de l’escrime coule dans ses veines. Son père, Olivier, vice-président du Servette FC, a participé aux Jeux olympiques de Los Angeles
en 1984. Il a surtout été sacré champion d’Europe individuel à l’épée et
vice-champion du monde par équipes en 1982.
«Mon grand-père maternel a aussi gagné une médaille olympique et mon
arrière-grand-père a fondé la Société d’escrime de Bâle», ajoute Jean-Baptiste.
Autant dire que le Genevois rêve de marcher sur les traces de ses «ancêtres».
Sans subir la moindre pression familiale. Sans craindre la comparaison. «Mon
but dans la vie est de devenir le meilleur possible», clame-t-il. Cela pourrait
l’amener aux Jeux olympiques de Pékin en 2008.
DAPHNÉ CRAMER RESTE PRUDENTE
Quelle drôle de saison! Depuis une année, depuis son titre de
championne de Suisse à l’épée, Daphné Cramer est passée par tous les états
d’âme. Elle a d’abord traîné une blessure au sacrum pendant quatre mois. Elle a
ensuite égaré sa motivation. Sans en connaître vraiment la raison. «Je n’avais
plus la tête à ça, je n’arrivais pas à retrouver mon niveau», concède-t-elle.
Le déclic a pourtant eu lieu. A Budapest. À Budapest. «Le pire tournoi
de ma vie», lâche-t-elle. Avec un sourire timide. Daphné Cramer tombe le
masque: en Hongrie, elle a tiré comme une débutante. «Je me suis fait éliminer
au premier tour. C’était la honte! Mon maître était terriblement déçu et il me
l’a fait comprendre... Je devais me remettre très vite au boulot».
La Genevoise a pourtant dû prendre son mal en patience. Calmer son
entourage, assez exigeant, afin de retrouver un semblant de sérénité. «Tout le
monde me tombait dessus, avoue-t-elle. Mais je n’ai pas que ça à faire! Je suis
en plein dans l’année du bac. Je ne peux pas m’engager autant qu’avant...».
Daphné Cramer était persuadée que «ça reviendrait tout seul».
La suite lui donne raison. L’escrime, Daphné l’a dans le sang! Elle
reste l’un des plus sûrs espoirs de l’épée suisse. No 16 en Coupe du monde elle
s’est d’ailleurs envolée hier matin pour la Sicile. Avec Sophie Lamon, Lorraine Marty et Tiffany Geroudet. Quatre «mousquetaires» en jupon qui ont
suffisamment de talent pour monter sur le podium par équipes.
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En individuel, Daphné Cramer préfère garder ses ambitions pour elle.
L’envie est là. La motivation aussi. Mais elle sait qu’en escrime, cela ne
suffit pas toujours pour déplacer des montagnes. «Je suis réaliste: je ne suis
pas favorite, assène-t-elle. Cela dépendra de la forme du jour, de l’humeur du
jour...» Dame Chance aura aussi son mot à dire dans cette histoire.
La Genevoise se montre volontiers prudente. Depuis deux mois, elle
flirte avec le Top-10. À Burgos, elle s’est même hissée à la troisième place.
Plutôt prometteur! Mais Daphné Cramer laisse parler son expérience. L’an
dernier, elle était rentrée bredouille et... déçue de son expédition
«mondiale». Autant dire qu’elle ne se permet plus de rêver en rose. À tord ou à
raison? Réponse demain à Trapani.
Jean-Daniel Sallin,
Tribune de Genève du 9 avril 2003