Text Box: 140e anniversaire de la SEG
Par Pierre Beausire

 

                                                                                                                    

 

 

 

Voici un résumé de ce que nous pouvons lire dans les plaquettes éditées à l’occasion des 100e et 125e anniversaires :

 

Au milieu du XIXe siècle, il y avait à Genève, une demi-douzaine de salles d’armes. Chaque maître réunissait autour de lui, dans ses locaux, les élèves qui suivaient son enseignement. Déplorant cette dépendance un certain nombre d’escrimeurs décidèrent de fonder une société titulaire d’une salle, dans laquelle un professeur viendrait donner des leçons.

 

C’est alors que le 12 avril 1862 (il y a donc 140 ans) fut créée, en présence de 60 membres, la Société d’escrime sous la présidence de M. Richard Pictet qui devait rester à ce poste durant dix-neuf ans.

 

Un local considéré comme « très convenable » fut loué dans la maison des Hôtels garnis, à la rue du Stand et le premier maître d’armes fut engagé en la personne de Théodore Renevier, fils. (Nous reviendrons prochainement sur les aventures de ce personnage et celles de ses ascendants).

 

Cette société devait devenir la Société d’Escrime de Genève en 1886 et en 1923 elle fusionnait avec le Cercle Saint-Georges représenté notamment par le Dr Patru et Constantin Antoniadès.

 

Le local, assez sombre, ne devait pas être tout de même suffisant en raison du développement de la société qui déménagea en 1867 au 12 de la rue des Chanoines, actuelle rue Calvin. Ce nouveau local plus satisfaisant (on avait pu en 1892 remplacer l’éclairage au gaz par l’électricité) avait l’inconvénient de posséder des colonnes au milieu de la salle ce qui n’empêcha pas la société d’y rester jusqu’en 1897. Cette année-là MM. Bordier offrirent une salle spacieuse à la rue de Hollande qu’il fallut quitter en 1918 pour s’installer à la Corraterie.

 

En 1927, l’idée de creuser sous le Terraillet un tunnel débouchant au milieu de la Corraterie inquiéta un moment les membres de la Société. Pourtant les difficultés financières des années 30 avaient des répercussions sur les comptes de la Société qui allaient de mal en pis de sorte que, en 1937, le comité décida de diminuer les frais de location et de déménager à la rue du Conseil-Général. Les escrimeurs sont restés dans ces locaux durant 23 ans, chassés

 

alors par la démolition de l’immeuble. La société prit alors possession de nouveaux locaux à la rue Dancet, en 1960. Cependant cette salle devint rapidement trop petite, bien qu’il fût possible pour le confort des occupants d’installer des bouilloires sur les poêles du vestiaire puis enfin de faire installer des douches.

 

Le comité se préoccupait d’améliorer le confort général. L’achat d’un ventilateur fut considéré comme un luxe. Il fut alors proposé de pulvériser dans les vestiaires, au moyen d’une seringue, du liquide parfumé. L’innovation qui rencontra le plus d’opposition fut l’installation du téléphone, placé cependant après une souscription privée.

 

C’est enfin depuis le 30 novembre 1970 que la salle d’armes se déplaça où elle se trouve actuellement, soit au Pavillon des sports du Bout-du-Monde.

 

Lorsqu’en 1881 Richard Pictet quitta la présidence, il fut remplacé par Charles Aubert puis Ferdinand Lacombe, Henri Poulin, Louis Buscarlet, Auguste Vernet, Maurice Pictet de Rochemont, Eugène Empeyta, Etienne de Rham, Jacques Hochstaetter, Gaston Mayor et enfin Patrick Cramer.

 

La Société d’escrime d’alors organisait régulièrement des assauts soit entre ses membres soit avec d’autres sociétés dotés de chalenges et autres prix. Ces assauts étaient souvent suivis d’un souper froid (nous n’avons donc rien inventé). Il y avait aussi des assauts pique-nique et des assauts publics payants, des assauts de bienfaisance ou avec invitation de dames. La tenue était alors de soirée ou d’escrime

 

Il ne peut y avoir d’exercice des armes sans la présence active d’un maître qualifié pour former et entraîner les escrimeurs.

 

Après Me Théodore Renevier, fils, qui fut le premier maître d’armes et qui le resta pendant dix-huit ans, la société fit un essai, presque forcé, d’une année avec son oncle Me Ressignière et engagea ensuite Me Guépin, à l’allure martiale. En 1888 arriva Me Rollet aux talents variés puisqu’il était en même temps professeur de billard (l’était-il aussi, comme d’autres, de danse ou de boxe ?)

 

Me Rollet possédait aussi un tempérament impulsif qui l’entraîna en 1893 à rencontrer en duel son collègue Me Luisenton à la suite d’une controverse sur une méthode d’enseignement. Il ne reste hélas pas de traces du résultat de ce duel, la société s’étant prudemment tenue à l’écart de cette discussion. Mais il faut penser que Me Rollet n’eut pas trop à souffrir de cet assaut puisqu’il continua à prodiguer ses conseils jusqu’en 1901. (Il reste cependant assez d’allusions sur les difficultés que ce personnage a causées à la société pour en faire une rubrique spéciale qui pourrait être maintenant amusante.) La situation du reste se détériora entre ce maître et la société tant et si bien qu’il y eut des menaces de procès de part et d’autre.

 

 

Pour remplacer Me Rollet devenu par trop encombrant, un militaire de Paris fut appelé à l’essai mais son âge (41 ans) fit l’objet de doute quant à sa condition physique. Cependant après quelques jours probatoires, Maître Henri Berretrot fit preuve de santé et de vigueur. Homme rangé et d’un caractère agréable il produisit bonne impression et fut engagé le 14 juin 1901. Pourtant, après quelques années d’enseignement consciencieux Me Berretrot se mit à préférer le « gros rouge qui tache » et la société se vit dans l’obligation de s’en séparer en 1907 pour le remplacer par Me Jourdant qui effectua un travail de grande valeur jusqu’en 1936 date à laquelle il se retira ayant atteint un âge respectable.

 

Il céda sa place à Me Mignot qui fut mobilisé en 1939 pour une guerre qui lui coûta un bras et l’empêcha de reprendre son activité.

          

C’est alors qu’apparu, au printemps de 1942, Me Léveillé, de qui nombreux d’entre nous parlent encore avec amitié et affection. Il réduisit son activité en 1974 et prit sa retraite en 1975. C’est alors que Me Raymond Hyvernaud devint seul responsable de la salle après avoir été engagé en 1970 déjà. Il enseigne maintenant l’art de l’escrime de théâtre avec un certain succès.

 

Puis nous avons connu Me Léger pour qui l’escrime n’était qu’une de ses nombreuses activités. Et actuellement Me Jean-Marc Cagnet, qui obtient de ses jeunes élèves de nombreuses satisfactions.

 

Au début du siècle dernier (le XXe), il était coutume d’avoir en plus du Maître d’armes titulaire, un prévôt chargé de compléter la leçon et de faire les travaux divers nécessaires dans une salle. Il y eut à la Société d’escrime deux prévôts dont il faut noter l’activité. Le prévôt Delaigue qui passa rapidement en 1889 mais qui revint fonctionner comme maître d’armes lorsque Maître Jourdant était mobilisé. César Molliet, entré comme prévôt en 1897 le resta jusqu’en 1910, puis il revint un certain temps et quitta la société en 1935 en raison du manque d’élèves. Il reprit cependant le chemin de la salle en 1939 pour assurer la continué de l’activité de la société en remplacement de Me Mignot, handicapé à vie.

 

 

Jadis, les armes se pratiquaient au fleuret seulement et les épéistes faisaient figure de spadassins dangereux. A partir de 1907, l’assaut à l’épée se développa entraînant l’emploi de tenues beaucoup plus résistantes. Dès ce moment le problème des juges se posa avec beaucoup plus d’acuité. Ces derniers furent dès lors l’objet de nombreuses critiques en raison de la difficulté de déclarer la touche valable. De nombreux assauts se terminèrent en pugilats, les tireurs contestant les décisions, souvent tendancieuses de juges incompétents ou de mauvaise foi. Les escrimeurs genevois décidèrent de ne plus participer à des tournois à l’étranger.

 

 

 

 

Enfin et pour terminer ce brin d’histoire il ne faut pas oublier de signaler que naquit alors l’idée de pouvoir constater  la validité des touches par un moyen mécanique ou électrique. Dès 1925, des membres de la Société d’escrime de Genève essayèrent de mettre au point un appareil de ce genre.
M. Kugler a travaillé des mois pour mettre au point un système satisfaisant et en 1927 on pouvait déjà l’utiliser. Cet appareil, amélioré par un ingénieur français, fut présenté à Paris avec beaucoup de succès. Mais l’appareil n’ayant pas été breveté, il fut commercialisé par un producteur lyonnais.

 

 

P. B.