CHAMPION

(TEXTE DE CHARLES BEAUSIRE)

 
                                                                                                                                                             

 

 On peut avoir ses préférences dans notre admiration pour le geste sportif ou pour un champion en particulier. Cependant on ne peut empêcher d’admirer sans réserve les athlètes capables d’enchaîner avec succès

  

2 disciplines d’affilée comme: le biathlon (tir au fusil et ski de fond)

ou 

3 disciplines d’affilée comme: le triathlon (natation, cyclisme, course à pied)

ou

 5 disciplines d’affilée comme: le pentathlon (escrime, tir au pistolet, équitation, natation et course à pied)

ou

 7 disciplines d’affilée comme: l’heptathlon (athlétisme femmes)

ou

 

10 disciplines d’affilée comme:

décathlon (athlétisme hommes) 

 

C’est pour ces raisons que j’ai pensé vous intéresser en vous présentant un escrimeur champion du monde et d’Europe.

 

 

 

 

SEBASTIEN DELEIGNE

(une épée du pentathlon moderne)

Grâce à Me Daniel Pégais de Escrime Magazine. Cette petite digression sur le triathlon est valable pour tous les athlètes pratiquant des disciplines multi-sports, dont le pentathlon encore plus technique. (Sport et Vie no 18)

Le triathlon c’est trois fois plus difficile!

 

  

 La Direction des Sports n’a reconnu le triathlon en France qu’en avril 1986, enfourchant ainsi avec retard un cheval bien emballé.

 D’emblée, on classa le triathlon comme une discipline à hauts risques, aux côtés du football ou de l’alpinisme. Par son volume d’entraînement et les conditions de cours, le triathlète s’expose, en effet, à de multiples périls (noyade, chutes, etc.). En France, quelques cas d’accidents mortels d’origine traumatique montrent la réalité du danger. En revanche, sur le plan de la physiologie, les risques restent minimes.

 En triathlon, le temps consacré à la préparation même par des amateurs de niveau moyen dépasse celui relevé dans n’importe quelle autre discipline. L’entraînement dure environ six heures hebdomadaires pour les moins assidus et il dépasse 20, voire 25 heures, chez les professionnels. On peut observer d’ailleurs que les charges d’entraînement des triathlètes s’accroissent avec l’allongement de leurs distances de prédilection et leur niveau de compétence. C’est bien simple. Au plus haut niveau, les triathlètes consacrent à l’entraînement dans chaque discipline presque autant de temps que les spécialistes de chacune d’elles. Ce travail intensif leur procure, bien évidemment, une excellente condition physique. Leur VO2 Max dépasse souvent les 72 ml/mn.kg et leur adiposité est de l’ordre de 7,1 % (18). Les meilleures femmes montrent également de brillantes dispositions: les athlètes de l’équipe britannique, par exemple, affichent une VO2 Max proche de 65 ml/mn.kg (26), alors que leur adiposité se situe en-dessous de celle d’athlètes, nageuses ou cyclistes à capacité aérobie similaire (2). L’ensemble de ces caractéristiques physiologiques contredit en tout cas l’idée selon laquelle les triathlètes d’élite constitueraient des champions au rabais, ayant préalablement échoué dans un des trois sports formant leur discipline. Il s’agit d’authentiques athlètes!


 

Les sportifs français sacrés double champion du monde et d’Europe ne sont pas légions... Le pentathlète Sébastien Deleigne, né à Toulouse voici bientôt 34 ans, constitue un bel exemple d’éclectisme et d’adaptation à des disciplines pour lesquelles il ne présentait pas à priori de dispositions particulières. L’escrime en fait partie et au... fil de l’épée, il en est devenu une (au sens de pointure) dans son domaine, cultivant parallèlement des dons de pistolier, de cavalier, de nageur et de coureur à pied! Les travaux d’Hercule «revisités» en quelque sorte par cet athlète complet. Rencontre avec un type plus souvent premier que troisième...

 

«Un jour, alors que je venais d’avoir quatorze ans et que j’alignais les longueurs de bassin depuis six ans, j’en ai eu un peu marre car l’entraînement était devenu trop répétitif et j’avais envie de découvrir autre chose...» En un mot, le petit Sébastien, se doutant qu’il ne deviendrait jamais un nouveau Mark Spitz, avait fait le tour de la question côté natation et comme il montait déjà à cheval et qu’il se débrouillait plutôt bien en course à pieds, on lui conseilla alors de «tâter» du pentathlon moderne. «J’ai découvert un univers complètement nouveau d’autant plus que j’ai dû alors me familiariser et surtout m’entraîner dans cinq disciplines simultanément au lieu d’une seule! »

 On ne peut pas dire que notre futur champion du monde ait été vraiment emballé par ses premiers contacts avec l’escrime et plus précisément l’épée, l’arme du pentathlète. «J’avoue qu’au début, les stages me sont apparus assez rébarbatifs car je n’ai pas trouvé l’amusement qu’un ado est en droit d’attendre d’un sport. J’ai surtout été surpris par la violence des assauts. Je m’attendais à quelque chose de plus technique, de plus calculé mais à cet âge-là, les gars n’avaient qu’une seule idée: toucher au plus vite!»

 Ce qui ne s’avérera pas si négatif que cela par la suite pour Sébastien, contraint par les règles du pentathlon, à faire la différence en compétition sur... une touche! «Une poule unique réunit les 32 tireurs du tableau final et tous les combattants s’affrontent entre eux. C’est le premier qui touche dans un délai limité à une minute qui gagne. Si rien n’est marqué, c’est double défaite...» 31 assauts en l’espace de trois heures, ça demande de sacrées qualités physiques mais aussi nerveuses. «Vainqueur ou perdant, il faut immédiatement se reconcentrer sur l’assaut suivant en oubliant le précédent et c’est le plus éprouvant psychiquement». Préparé actuellement par le Maître Christian Roudaut, entraîneur national des pentathlètes, Sébastien Deleigne avoue aujourd’hui: «J’ai appris, les progrès aidant, à prendre du plaisir à la pratique de l’épée au point qu’à présent, c’est la discipline où j’obtiens les meilleurs résultats derrière la course à pieds alors qu’on aurait pu penser, de par ma formation, que ce serait la natation,...»

 Sacrifiant à trois gros entraînements hebdomadaires agrémentés de deux leçons purement techniques au plastron, Sébastien a le bonheur de se «mesurer» régulièrement à l’INSEP au «gratin» de l’épée française. «Ce sont des séquences très enrichissantes qui m’ont amené à croiser le fer avec mes copains Riboud, Boisse, Srecki et aujourd’hui, Obry et Delhomme. D’ailleurs quand j’étais junior, j’ai même disputé les mêmes tournois que Rémy, le pré-Monal par exemple». A Sydney (un mauvais souvenir puisqu’il se classa... quatrième), Sébastien bénéficia du soutien dans les tribunes des Flessel, Tripathi, Srecki, Obry, etc. C’était super sympa de leur part», dit-il. Ses qualités? «Ma mobilité, mon agressivité, mon goût du pressing». Ses défauts? «Mon manque de patience ce qui me vaut parfois de me faire contrer».

 En juillet, il convoitera un 3ème titre mondial en Angleterre... Poursuivra-t-il ensuite jusqu’aux Jeux d’Athènes? «Pour l’instant, je n’en sais rien. La cicatrice de Sydney est encore trop fraîche. En 2004, j’aurai 37 ans et d’ici  là, je veux gérer année par année. En prenant un peu de recul et en donnant à ma vie d’autres orientations...». En tout cas, l’épée au fourreau, ce n’est pas pour demain assurément. Passion oblige...

 

Daniel Pégois, Escrime Magazine 35